Mais où sont passés les indo-européens ?

 La diversité des langues humaines nous a toujours intrigué, si l’Homme a une origine commune comment se fait-il que nous ne parlons pas une langue commune ?

De nombreuses mythologies ont tenté d’apporter une réponse à cette question. Nous connaissons bien le mythe de la Tour de Babel : les hommes juste après le Déluge parlaient tous la même langue, ils décident de construire une tour immense au milieu du désert pour toucher les cieux, mais Dieu fâché de cette outrecuidance les dispersa sur l’ensemble de la Terre et leur donna à chacun une langue différente pour qu’ils ne puissent plus jamais entreprendre un projet commun.

On retrouve cette même structure de mythe dans beaucoup de cultures. L’humanité connaissait une époque d’harmonie heureuse et ne parlait qu’un seul langage, puis vint un élément bouleversant cet état de grâce (le plus souvent une punition) et depuis les Hommes ne s’entendent plus.

  Vous retrouverez quelques-uns de ces mythes d’origine des langues sur cette page : https://cursus.edu/articles/44042/les-mythes-des-origines-des-langues

Lorsque les mythes bibliques cessent peu à peu d’être la seule explication du monde, il fallut bien essayer de trouver une explication rationnelle à la diversité des langues.

Langues diverses certes, mais néanmoins avec des filiations : on connaissait déjà les origines grecques, latines ou germaniques de nombre de nos mots.

Ce fut Leibniz qui le premier, dans ses Nouveaux essais sur l’entendement humain, remarquant ces ressemblances, proposa une origine commune de toutes les langues européennes. Les peuples européens (car les langues suivent les peuples) viendraient pour lui des populations Scythes venus de la Mer noire.

Tout au long du XVIIIème siècle, on ne cessera de repousser l’origine des européens vers l’est, jusqu’à l’Inde. Hypothèse qui avait le bénéfice, non négligeable pour l’époque, de se passer d’une origine sémite des peuples européens.

C’est l’allemand Franz BOPP qui, au tout début du XIXème siècle, systématise ce genre d’étude et crée à la fois la discipline de la Grammaire comparée et le terme d’Indo-européen.

Nous venons d’ailleurs de cataloguer son œuvre majeure : « Grammaire comparée des langues indo-européennes comprenant le sanscrit, le zend, l'arménien, le grec, le latin, le lithuanien, l'ancien slave, le gothique et l'allemand. »

https://www.livresanciens.com/index.php?livre=201049

L’hypothèse d’une langue commune indo-européenne ne cessera d’être développée durant le XIXème et le XXème siècle. Jusqu’à la construction d’un peuple mythologique, porteur de cette langue primitive : les aryens.

Ce mythe du peuple aryen sera repris par tous les mouvements politiques en mal d’origine, à commencer par les nazis qui en fera l’usage que l’on sait. Mais aussi actuellement par les mouvements nationalistes hindoue qui développent leur concept d’hindouité autour du peuple mythique des Aryas.

Mais la Science est toujours en mouvement et l’hypothèse Indo-européenne présente déjà beaucoup de fissures. La vérité archéologique est probablement bien plus complexe.

Je vous invite à écouter cette excellente conférence de Jean Pierre Demoule qui permet d’avoir un état des lieux des hypothèses actuelles sur l’origine des langues européennes.

https://youtu.be/IuRpinJvKdI

Elle vient appuyer son livre édité en 2017 : « Mais où sont passés les Indo-Européens ? Le mythe d'origine de l'Occident »

S.